La XXIIe réunion annuelle du FMI et de la
BIRD
C’est à Rio de Janeiro que
s’est tenue cette année, du 26 au 29 septembre, la réunion du Fonds monétaire
international (FMI) et de la
Banque internationale pour la reconstruction et le
développement (BIRD). En règle générale, les réunions de ces deux Institutions
spécialisées des Nations Unis ont lieu une année à Washington, l’année suivante
dans un autre pays. Mais il a été décidé cette fois que les deux prochaines
sessions se tiendront à Washington, et seulement la suivante en 1970 en Italie.
Parallèlement, selon la coutume, tenaient aussi leur réunion annuelle, la Société financière
internationales (SFI), créée en 1956, et l’Association internationale pour le
développement (AID), fondée en 1960, qui sont deux filiales de la Banque. En outre, pour la
première fois, le Conseil administratif du Centre international pour le
règlement des controverses relatives aux investissements (International Center
for Settlement of Investment Disputes), dont le but est d’orienter et de
faciliter les investissements privés vers les pays en voie de développement,
s’est réuni à Rio. Il compte 55 pays membres ; son président est le
président de la Banque
mondiale, le secrétaire général est M. Aron Broches ; la liste d’arbitres
et conciliateurs qu’il offre aux pays membres compte déjà 50 noms, représentant
13 pays.
Peut-être la décision
prise à Rio concernant les droits
spéciaux de tirage est-elle la mesure la plus importante et la plus neuve
depuis la fondation du FMI et de la Banque
Mondiale à Bretton Woods en 1944. Il s’agit, comme on sait, de
résoudre le problème des liquidités internationales. Les seules « monnaies
de réserve » acceptées jusqu’ici par le Fonds étaient le dollar, la livre
et l’or. Le déficit de la balance des paiements des Etats-Unis et le
l’Angleterre gêne l’exportation de ces monnaies sur le marché extérieur, ce qui
à son tour empêche les autres gouvernements d’accroître leurs réserves. D’autre
part, l’Union sud-africaine, principal producteur d’or, ne fournit plus ce
métal en quantité égale à ce qu’elle produisait autrefois.
Un signe de la gravité
présente du problème des liquidités internationales est que pour la première
fois cette année le FMI a accepté pour ses opérations financières les monnaies
nationales de quatre pays membres : le Brésil, la Malaisie, le Venezuela et
la Norvège.
La réforme du système
monétaire étudiée à Rio consiste en ceci que les paiements ne seront plus
exagérément dépendants de la situation économique et des responsabilités financières
d’un seul pays (Etats-Unis ou Grande-Bretagne), sans pour autant dépendre des
limitations physiques d’un produit naturel comme l’or. Michel Debré, comme on
sait, déclara que la mesure adoptée ne fournit qu’une solution partielle et
limitée au problème des liquidités internationales : elle invente une
forme de crédit, elle ne crée pas une monnaie.
Le projet approuvé à Rio
avait été discuté à Londres , le 26 août, par le Groupe des Dix (Marché commun
européen, Canada, Angleterre, Etats-Unis et Japon) qui détient 55,36% des
votes, proportionnellement à sa part de dépôts, au sein de l’organe directeur
du FMI.
La réforme, si les
négociations concernant les modalités d’exécution se poursuivent rapidement,
entrera en vigueur en octobre 1968. Conformément au nouveau système, un compte
spécial sera ouvert au sein du FMI : les Etats membres ne seront plus
obligés de faire leurs dépôts en dollars, en livres ou en or, pour obtenir des
soldes favorables. Le principe est que « la communauté internationale doit
être en état de contrôler les réserves, et non que les réserves contrôlent la
communauté » a dit le Directeur exécutif du FMI.
Une autre résolution
importante approuvée à Rio invite le FMI et la Banque à poursuivre l’étude
des marchés mondiaux en vue de parvenir è un accord pour la stabilisation du
prix des produits de base (coton, riz, café, cuivre, étain, céréales…). Ce fut
évidemment le thème le plus débattu par les pays en voie de développement au
cours des délibérations. On estime que le pouvoir d’achat de ces pays a diminué
de 45% au cours des 15 dernières années. Quinze pays francophones d’Afrique,
qui s’étaient réunis à Dakar le 22 septembre juste avant la session de Rio, ont
présenté le projet de résolution que fut approuvé. Pour une fois aussi les 19
pays d’Amérique latine et les Philippines ont fait preuve d’une certaine
cohésion face aux pays industrialisés.
Notons encore quelques
points qui furent touchés lors de la réunion de Rio. A la demande de M. Georges
Woods, président de la Banque,
les Etats membres ont approuvé le transfert de 10 millions de dollars de la Banque à l’Association
internationale pour le développement. Pour la sixième année consécutive, la Suisse a fait un apport
spécial de fonds à l’Association, et elle examine la possibilité de lui
consentir un prêt, ce qui serait le premier cas d’un prêt ainsi fait à l’AID.
Pour la première fois aussi, l’Italie, a accordé un prêt au FMI.
Enfin on parla, mais assez
vaguement, de l’entrée possible d’autres pays du bloc communiste au Fonds monétaire
international ; actuellement, seule la Yougoslavie en fait
partie.
A Rio, toutes les
discussions furent centrées sur le problème de la monnaie. Le FMI exige la
stabilité monétaire : cela ne signifie-t-il pas pour tel pays
sous-développé la stabilité de la misère ? La crise mondiale que nous
traversons est plus économique que financière : elle réside dans
l’inégalité de concurrence sur le marché mondial. Et il est à craindre que les
meilleures réformes financières ne changeront pas cette situation. Citant un document
romain, le président de la
Banque déclara : « Ce dont nous avons besoin, c’est
d’actes créateurs ».
Alfredo
Bruno Bologna
Paris, décembre
1967, Nº 20, p. 1260
La XXIIe réunion annuelle du FMI et de la
BIRD
C’est à Rio de Janeiro que
s’est tenue cette année, du 26 au 29 septembre, la réunion du Fonds monétaire
international (FMI) et de la
Banque internationale pour la reconstruction et le
développement (BIRD). En règle générale, les réunions de ces deux Institutions
spécialisées des Nations Unis ont lieu une année à Washington, l’année suivante
dans un autre pays. Mais il a été décidé cette fois que les deux prochaines
sessions se tiendront à Washington, et seulement la suivante en 1970 en Italie.
Parallèlement, selon la coutume, tenaient aussi leur réunion annuelle, la Société financière
internationales (SFI), créée en 1956, et l’Association internationale pour le
développement (AID), fondée en 1960, qui sont deux filiales de la Banque. En outre, pour la
première fois, le Conseil administratif du Centre international pour le
règlement des controverses relatives aux investissements (International Center
for Settlement of Investment Disputes), dont le but est d’orienter et de
faciliter les investissements privés vers les pays en voie de développement,
s’est réuni à Rio. Il compte 55 pays membres ; son président est le
président de la Banque
mondiale, le secrétaire général est M. Aron Broches ; la liste d’arbitres
et conciliateurs qu’il offre aux pays membres compte déjà 50 noms, représentant
13 pays.
Peut-être la décision
prise à Rio concernant les droits
spéciaux de tirage est-elle la mesure la plus importante et la plus neuve
depuis la fondation du FMI et de la Banque
Mondiale à Bretton Woods en 1944. Il s’agit, comme on sait, de
résoudre le problème des liquidités internationales. Les seules « monnaies
de réserve » acceptées jusqu’ici par le Fonds étaient le dollar, la livre
et l’or. Le déficit de la balance des paiements des Etats-Unis et le
l’Angleterre gêne l’exportation de ces monnaies sur le marché extérieur, ce qui
à son tour empêche les autres gouvernements d’accroître leurs réserves. D’autre
part, l’Union sud-africaine, principal producteur d’or, ne fournit plus ce
métal en quantité égale à ce qu’elle produisait autrefois.
Un signe de la gravité
présente du problème des liquidités internationales est que pour la première
fois cette année le FMI a accepté pour ses opérations financières les monnaies
nationales de quatre pays membres : le Brésil, la Malaisie, le Venezuela et
la Norvège.
La réforme du système
monétaire étudiée à Rio consiste en ceci que les paiements ne seront plus
exagérément dépendants de la situation économique et des responsabilités financières
d’un seul pays (Etats-Unis ou Grande-Bretagne), sans pour autant dépendre des
limitations physiques d’un produit naturel comme l’or. Michel Debré, comme on
sait, déclara que la mesure adoptée ne fournit qu’une solution partielle et
limitée au problème des liquidités internationales : elle invente une
forme de crédit, elle ne crée pas une monnaie.
Le projet approuvé à Rio
avait été discuté à Londres , le 26 août, par le Groupe des Dix (Marché commun
européen, Canada, Angleterre, Etats-Unis et Japon) qui détient 55,36% des
votes, proportionnellement à sa part de dépôts, au sein de l’organe directeur
du FMI.
La réforme, si les
négociations concernant les modalités d’exécution se poursuivent rapidement,
entrera en vigueur en octobre 1968. Conformément au nouveau système, un compte
spécial sera ouvert au sein du FMI : les Etats membres ne seront plus
obligés de faire leurs dépôts en dollars, en livres ou en or, pour obtenir des
soldes favorables. Le principe est que « la communauté internationale doit
être en état de contrôler les réserves, et non que les réserves contrôlent la
communauté » a dit le Directeur exécutif du FMI.
Une autre résolution
importante approuvée à Rio invite le FMI et la Banque à poursuivre l’étude
des marchés mondiaux en vue de parvenir è un accord pour la stabilisation du
prix des produits de base (coton, riz, café, cuivre, étain, céréales…). Ce fut
évidemment le thème le plus débattu par les pays en voie de développement au
cours des délibérations. On estime que le pouvoir d’achat de ces pays a diminué
de 45% au cours des 15 dernières années. Quinze pays francophones d’Afrique,
qui s’étaient réunis à Dakar le 22 septembre juste avant la session de Rio, ont
présenté le projet de résolution que fut approuvé. Pour une fois aussi les 19
pays d’Amérique latine et les Philippines ont fait preuve d’une certaine
cohésion face aux pays industrialisés.
Notons encore quelques
points qui furent touchés lors de la réunion de Rio. A la demande de M. Georges
Woods, président de la Banque,
les Etats membres ont approuvé le transfert de 10 millions de dollars de la Banque à l’Association
internationale pour le développement. Pour la sixième année consécutive, la Suisse a fait un apport
spécial de fonds à l’Association, et elle examine la possibilité de lui
consentir un prêt, ce qui serait le premier cas d’un prêt ainsi fait à l’AID.
Pour la première fois aussi, l’Italie, a accordé un prêt au FMI.
Enfin on parla, mais assez
vaguement, de l’entrée possible d’autres pays du bloc communiste au Fonds monétaire
international ; actuellement, seule la Yougoslavie en fait
partie.
A Rio, toutes les
discussions furent centrées sur le problème de la monnaie. Le FMI exige la
stabilité monétaire : cela ne signifie-t-il pas pour tel pays
sous-développé la stabilité de la misère ? La crise mondiale que nous
traversons est plus économique que financière : elle réside dans
l’inégalité de concurrence sur le marché mondial. Et il est à craindre que les
meilleures réformes financières ne changeront pas cette situation. Citant un document
romain, le président de la
Banque déclara : « Ce dont nous avons besoin, c’est
d’actes créateurs ».
Alfredo
Bruno Bologna
Paris, décembre
1967, Nº 20, p. 1260
http://www.cerir.com.ar/admin/_cerir/archivos/libros/0000314/La%20XXII%20reunion%20annuelle.pdf
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